Autre(s)pARTs
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communication : Eric CHEVANCE
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octobre 2003
Rflexions
pour un rfrentiel
d'valuation
qualitative des pratiques et
Espaces /
projets artistiques pluridisciplinaires
visant
une autre relation l'art et aux populations
Les pratiques culturelles et artistiques qui tablissent
aujourd'hui de nouvelles relations entre l'art et les populations ont besoin
d'tre rendues plus visibles et mieux reconnues. Au-del de la relle
singularit de chacune de ces expriences, disposer d'un rfrentiel commun
d'valuation, apprhendable par l'ensemble de leurs partenaires, peut alors
devenir une aide prcieuse. Dans cette voie, Autre(s)pARTs propose d'valuer
chaque cas particulier comme actualisation et combinatoire - en effet trs
spcifique - d'un ensemble de traits qualitatifs plus gnraux.
La nature caractrisante et multiple de ces traits permet dj une
valuation croise, qualitative et discriminante, des pratiques concernes, en
termes tant de dynamique propre que de participation des enjeux d'intrt
gnral. Si une partie de ces traits peuvent tre "consolids"
partir de donnes quantifies ou d'indicateurs plus formaliss, reste que c'est
la cohsion qualitative et spcifique d'ensemble qui doit rester le critre
central d'apprciation.
Ce rfrentiel qualitatif est construit sur la base de la
situation franaise du dbut des annes 2000. Il est donc lui-mme valuer,
complter, amender, au fil des volutions et dbats publics se faisant jour.
Elabor par croisement de diffrents reprages et tudes antrieurs, sa
pertinence dborde largement les situations reprsentes au sein
d'Autre(s)pARTs, mme s'il est tout particulirement adapt ces cas
particuliers.
Les
Espaces / projets artistiques pluridisciplinaires[1], comme d'autres avant elles, dfendent
un choix de socit o le "droit la culture", comme il existe un
droit l'instruction ou la sant, doit tre assur par la puissance
publique.
Le service public culturel, reconnu
aujourd'hui de faon incontestable, s'appuie sur un encadrement normatif qui
lgitime et fonde l'intervention des pouvoirs publics en matire culturelle et
artistique :
-
le
prambule de la constitution de 1946, repris par celle de 1958, qui garantit
l'gal accs la culture" ;
-
le
dcret relatif aux attributions (initiales) du ministre charg de la culture du
24 juillet 1959 ;
-
les
lois de dcentralisation de 1982 et 1983 ;
-
le trait
de Maastricht du 7 fvrier 1992 ;
-
la loi d'orientation pour l'amnagement et le dveloppement
durable du territoire du 25 juin 1999
-
la
loi relative
au renforcement et la simplification de la coopration intercommunale du
12 juillet 1999.
Le service public de la
culture dfendu par nos Espaces /
projets est lgitim par la Charte des missions de
services publics pour le spectacle (octobre 1998), puisque le Ministre de la
Culture les a inscrites parmi les personnes de droit priv qui il confie des missions
de service public : "certains lieux de fabrication et de production
de spectacles vivants".
En 1993, une priorit de M. Toubon, ministre
de la Culture, fut d'intgrer la politique culturelle dans le cadre de
l'amnagement du territoire. La cohrence de l'ensemble se fondait sur l'ide
d'un ncessaire schma d'organisation de l'espace intgrant un service public
culturel de proximit s'appuyant sur des quipements pluridisciplinaires.
(L'changeur de Fre-en-Tardenois figurait parmi les 122 projets d'quipements
de proximit prsents en comit interministriel d'amnagement du territoire
le 20 septembre 1994.)
En mai 1999, Mme Trautmann, Ministre de
la Culture, annonce une rflexion en ce qui concerne "les nouveaux lieux
et les nouvelles approches qu'ils autorisent, de la friche industrielle aux
zones rurales, du centre multimdia au lieu de fabrication". (La mme
anne, Culture Commune devient Scne Nationale.)
En 2002, aprs le rapport command par M.
Duffour, secrtaire d'tat au Patrimoine et la Dcentralisation Culturelle,
des mesures nouvelles ont t spcifiquement inscrites au budget du ministre
de la Culture en faveur de la coordination des Espaces / projets
artistiques pluridisciplinaires et ont t confortes par des mesures dcides
en Comit Interministriel la Ville pour soutenir les rsidences d'artistes,
les friches et les "nouveaux lieux culturels" dans les sites
bnficiant de contrats de villes.
Quel avenir ?
Dans sa confrence de presse du 26 mai
2003, M. Aillagon, ministre de la Culture, a expos ce que serait l'action
territoriale de son ministre et a dnonc "les dsquilibres criants dans
l'amnagement du territoire". Les objectifs affichs "de parvenir
une plus grande galit dans l'accs aux lieux de cration et de diffusion sur
l'ensemble du territoire" et "d'encourager les expressions les plus
diverses de la culture contemporaine" rejoignent les proccupations que
nous avons tous au sein de nos Espaces / projets.
La multiplication des Espaces /
projets artistiques pluridisciplinaires est contemporaine du renouvellement des
pratiques artistiques. Celles-ci ont su trouver leur place dans nos espaces qui,
ouverts la pluridisciplinarit, favorisent l'interdisciplinarit. Nous y
accueillons le rock, la techno, les arts de la rue , la danse
contemporaine, le nouveau cirque, les marionnettes, les atypiques /
inclassables, le thtre contemporain, la scne qui croise les arts plastiques,
la vido, le multimediaÉ
Une "refondation des rseaux du
spectacle vivant" ne nous semble pas pouvoir se faire sans y intgrer la
place des Espaces / projets artistiques pluridisciplinaires dans un
nouveau schma d'amnagement culturel du territoire. Depuis longtemps dj,
nous inventons des lieux de vie et de convivialit, nous ouvrons les studios
une population de proximit parfois associe au processus de cration, et nous
(re)crons du lien social dans des territoires dshrits (quartiers urbains
priphriques et communes rurales).
2/ Elments pour un rfrentiel
d'valuation de nos Espaces / projets artistiques pluridisciplinaires
a) Contextes et positions
Constatant :
- lĠoubli, voire le
reniement de lĠexprience sensible dans un monde de plus en plus rationnel ;
- lĠchec dĠun demi-sicle dĠune politique de dmocratisation
culturelle qui nĠa pas su permettre au plus grand nombre lĠaccs aux Ïuvres
disponibles et aux quipements artistiques, qui se sont pourtant multiplis ;
- la pression uniformisante de la mondialisation dĠun ct, la
rgression identitaire sur les mythologies rgionalistes, ethniques et
religieuses de lĠautre ;
- la rupture des liens relationnels, intimes, mais aussi sociaux,
dans une socit qui semble constamment s'individualiser et se dliter en
particulier autour du rfrentiel obsessionnel de l'change marchand ;
- le dveloppement gnralis de l'organisation par projet, de
l'accroissement qualitatif et quantitatif de la flexibilit du travail et de
l'emploi, de la diffrenciation accrue des activits en particulier
professionnelles, lments qui sont dsormais des normes de nos socits de
l'innovation et de la ractivit, et non de simples particularits des milieux
artistiques ;
- la monte en puissance, puis la dominance socio-conomique et
idologique des industries culturelles, qui ont introduit un nouveau type de
rapport dmocratis entre art et populations ;
- l'extension exponentielle et non rgule des ingalits des
marchs contemporains de la rputation, o, partir de diffrences peu
flagrantes de comptence et de qualit, un petit nombre cumule une part
toujours plus grande des valeurs (dont montaires et de notorit) disponibles
;
- les comportements culturels du plus grand nombre qui sont
dsormais des assemblages complexes et tout fait indits entre, d'une part
l'utilisation de biens artistiques culturels industriels, d'autre part la
recherche de relations interhumaines plus directes et sensible.
Il nous semble urgent :
- de raffirmer la valeur de lĠart, non pas lĠart en tant quĠÏuvre
fige et dfinitive, mais lĠart en tant quĠlaboration dĠune parole et dĠune
relation sensibles, contemporaine et critique, lĠart agissant ;
- dĠtendre le droit la culture un plus grand nombre de
citoyens, en les rendant plus agents de leur propre dveloppement culturel ;
passer donc de la Òdmocratisation culturelleÓ une relle Òdmocratie
culturelleÓ ;
- d'attacher la plus grande importance la relation entre
pratique sociale et activits artistiques.
A cet effet, nous proposons aux artistes des cadres et des modes
de travail renouvels, non pour les contraindre, mais au contraire pour leur
permettre une plus grande libert. Ainsi, il nĠest pas question de fixer des
modles de relation avec les artistes mais bien de rinventer cette relation
chaque fois. LĠartiste peut ds lors travailler sĠil le souhaite de faon
autonome et isole, dans une sorte de laboratoire, ou bien en dveloppant des
relations avec des populations, des groupes ou des territoires, ces relations
venant nourrir le travail lui-mme, ou encore en se nourrissant dĠchanges avec
lĠquipe du lieu, ou dĠautres artistes convis partager le mme espace. Pas
dĠobligation donc, mais un contexte permettant lĠpanouissement et la
ralisation de projets qui, de ce fait, se trouvent en phase avec ceux qui
ils sĠadressent.
Nous participons ainsi, au sein d'un tiers-secteur artistique,
l'invention d'un nouveau compromis social permettant d'articuler pour le plus
grand nombre trois dimensions lies :
- la possibilit et la
capacit pour chacun de mieux participer aux dynamiques d'innovation et de
crativit, dans lesquelles nous sommes collectivement entrs, mme si ces
dynamiques impliquent un dveloppement conjoint de formes intensives et
diverses de flexibilit ;
- la ncessit complmentaire absolue que chacun puisse disposer
d'une scurit individuelle et professionnelle minimale, socialement garantie
tout au long du parcours de vie, sans laquelle l'injonction d'innovation ne
peut tourner pour le plus grand nombre qu'au dsastre d'une dstabilisation et
d'une dstructuration constamment subies ;
- lĠimpratif induit que les richesses et les diverses valeurs
ajoutes produites par la socit d'innovation / flexibilit soient plus
socialises, une rpartition bien moins ingalitaire de ces richesses entre
tous tant un des lments indispensables pour atteindre un nouveau compromis
social global.
b ) Esthtique
et processus
LĠart est au cÏur de nos projets, lĠart comme exprience sensible.
Or, on ne nous propose plus que de lĠart contempler, respectueusement,
religieusement. Cet art l produit encore, parfois, de beaux objets, mais il a
perdu toute valeur. Il nous faut retrouver la valeur de lĠart.
Si nous affirmons sa primaut dans nos pratiques, nous nous
dmarquons d'une conception par trop linaire de l'art, qui tient pour
essentiel et fondateur le geste singulier de l'artiste produisant une Ïuvre
originale, faire ensuite connatre au plus grand nombre. Nous mettons plutt
lĠaccent sur une conception htronome de l'art, o sont simultanment
prendre en compte, en mme temps que lĠaspect esthtique, les dimensions
conviviale, socitale, culturelle, politique, etc., des processus artistiques.
Nous concevons les dmarches artistiques comme des parcours relationnels qui
renouvellent nos modes de symbolisation et de socialisation. Si lĠprouv
sensible, les vcus esthtiques activs, qui restent pourtant ouverts des
motivations existentielles et sociales autres que strictement artistiques,
restent centraux, la polarisation est renforce sur la participation et la
rception artistiques, lĠimportance est redonne une vraie dialectique entre
dimension individuelle et dimension collective, des questions telles que
"qu'est-ce qu'on donne vivre comme exprience esthtique aux gens
?", "comment intgre-t-on les capacits d'apprciation et de jugement
artistique des "non- artistes", la culture vcue dont ils disposent
dj ?".
Nos projets artistiques combinent ncessairement et sans a priori
de hirarchisation, mais en tentant dĠen renouveler les enjeux, une pluralit
de modes d'activit : production et diffusion de spectacles ou d'vnements,
action culturelle et territoriale en relation directe avec des populations
particulires, formation amateur et transmission professionnalisante de savoirs
et savoir-faire, mise en dbat par l'artistique de questions culturelles,
socitales et politiques. Nous privilgions des initiatives qui touchent des
segments de population jusquĠici plutt exclus de lĠoffre culturelle
traditionnelle (habitants des quartiers "sensibles", du milieu rural,
etc.), en lien avec les politiques de la ville. Par l mme, une grande
importance est accorde l'invention de projets artistiques au contact direct
et avec des populations situes (sociologiquement ou/et territorialement).
Nous dveloppons aussi la co-gnration des processus artistiques
par des artistes professionnels et d'autres acteurs sociaux, la production d'une
manifestation ou d'une Ïuvre artistique matrialise apparaissant plutt comme
un moyen pour scander ce type de dmarche.
Au sein du thme de l'interdisciplinarit, nous prenons en compte
les spcificits des divers modes d'expression artistique, ainsi que la
question de ce qui reste pertinent dans la diffrenciation historique des
formes et modes d'expression artistiques.
Nous insistons enfin sur la transversalit entre les disciplines
artistiques. A une transversalit de "juxtaposition" o les artistes
travaillent ensemble mais restent chacun dans leur domaine propre, nous
prfrons une transversalit de "contamination" o les diffrentes
disciplines se nourrissent les unes des autres et o leurs frontires tendent
se recomposer.
c ) Partenaires,
territoires et dcentralisation
L'initiative de la socit civile et des acteurs indpendants est
essentielle dans le dveloppement de l'action artistique et culturelle. Le
champ artistique et culturel est en interaction avec d'autres champs : amnagement
du territoire, politiques de la ville et des pays, ducation et loisirs... La
mise en place d'une concertation vraie et prenne avec les reprsentants
institutionnels de ces secteurs est imprative.
A ct d'une participation l'effort de dmocratisation de la
culture qui reste l'enjeu central des quipements artistiques relevant des
Collectivits publiques, priorit est donne aux actions de dmocratie
culturelle, grce une prsence active et ramifie dans les territoires et au
contact des populations qui permet d'inventer avec ceux-ci une approche bien
plus interactive de l'art, et plus largement, des pratiques artistiques o
peuvent s'impliquer un plus grand nombre.
Notre conception est celle dĠun champ artistique non limit aux
disciplines artistiques traditionnellement valorises, et qui travaille
l'extension des relations entre lĠart et les populations - lĠcole, dans les
hpitaux, les prisons, les banlieues et quartiers dfavoriss -, qui implique
elle aussi une relation autre aux collectivits publiques.
Nous accueillons des quipes artistiques qui manquent de lieux de
fabrication, mais aussi d'implantation provisoire ou plus longue sur un
territoire donn. Au-del, lĠaccent peut-tre mis, lors de ces accueils, sur de
nouvelles et diffrentes relations avec les populations, plutt que sur la
simple fabrication artistique ou diffusion culturelle. De mme, nous
dveloppons les jumelages, non plus formels mais concrets et pratiques entre
quipes artistiques franaises et trangres, que ce soit au titre du projet
artistique d'ensemble ou au niveau des projets plus lmentaires. Nous
insistons aussi sur lĠimportance des rsidences en France et lĠtranger, sur
l'association forte entre quipes artistiques sur des priodes de plusieurs
annes.
Tenant prserver cette tension irrductible entre enjeux locaux,
nationaux et internationaux, nous ngocions de faon permanente avec les
diffrentes Collectivits publiques concernes mais aussi, nous en appelons
toutes les forces instituantes (professionnelles ou non), et notamment celles
qui, aux marges de lĠinstitution traditionnelle, posent les jalons de nouvelles
politiques artistiques, de nouvelles et autres relations avec la population.
d ) Gestion,
management et fonctionnement gnral
Notre conomie, prcaire de fait et non par choix, est
caractrise par une mixit entre :
- une initiative et un mode de gestion privs (dont associatifs)
garants de lĠindpendance des projets ;
- une forte dpendance l'conomie redistributive administre
(aides directes des Collectivits publiques, aides lies la solidarit
nationale et interprofessionnelle, exemption partielle de certaines charges) ;
- une mobilisation d'lments de l'conomie de rciprocit (dont
les implications bnvoles ou les changes de services non montaires).
Nos organisations et projets relvent donc d'un tiers-secteur
artistique, spcifique et ne pouvant tre rduit ni une simple dynamique
d'entreprises artistiques d'initiative prive et relevant avant tout d'une
conomie de march, ni au dveloppement et la gestion d'quipements relevant
surtout des Collectivits publiques.
Dfendant une primaut de la notion gnrique de projet de
dveloppement artistique et culturel, en lien avec des populations ou des
territoires situs, nous dsirons assurer une dynamique de dveloppement
culturel selon des objectifs clairs et non pas "bricoler" une
continuit de gestion des quipes ou quipements. La notion de "chef de
file" pour la coordination des projets lmentaires complexes ou du projet
gnral est aussi essentielle.
La multi-activit est constitutive de nos organisations et
projets, avec la ncessit induite de disposer de comptences plurielles et
toutes indispensables. Une centralit est accorde aux diffrentes formes de relation
de service dont la coordination seule permet la ralisation des projets. Une
efficacit simultanment artistique et sociale est revendique. Pour nous, tout
cela participe d'un tiers-secteur considrer comme un vritable monde de
l'art particulier, o un primtre largi de comptences doit pouvoir tre
prserv, tout comme une porosit d'accs la professionnalit dans la mesure
o les vrais savoir-faire se constituent surtout par accumulation progressive
et successive d'expriences.
LĠgalit de traitement est ncessaire, sur le plan des principes
comme des moyens affects, entre une pluralit de fonctions constitutives :
action culturelle et relation la population, production crative, diffusion
artistique, formation, dbat et organisation d'vnements collectifs, partir
d'un projet global.
La complexit des tches grer et coordonner implique de plus
en plus des modes de fonctionnement o nous partageons l'autorit et la
dcision, o la capacit d'inventer des articulations et des compromis devient
un savoir-faire collectif incontournable. De l, apparat lĠimportance de lĠquipe artistique,
constitue d'une pluralit de comptences (y compris celles qui ne sont pas
directement artistiques), engage dans une dmarche collective partageant un
mme objectif sur une priode dtermine. Il y a donc une prise de distance
avec lĠidologie ancienne du "crateur", ou du ÒdirecteurÓ seul
matre bord.
Nous dveloppons des outils de gestion mutualise entre projets ou
organisations artistiques, par exemple sur le plan des investissements
matriels, du partage de l'information et des savoir-faire, de la mise en place
d'pargne et de crdits-relais mutualiss, d'emplois mutualiss sur plusieurs
organisations... Nous utilisons enfin une comptabilit analytique lisible,
permettant d'avoir une prsentation et un suivi budgtaire effectif de la
pluralit des actions constitutive du projet gnral, comme de celui-ci dans sa
globalit.
LĠessentiel est bien pour nous l'art en train de se faire,
lĠexprience de lĠart et non plus seulement le savoir de l'art ou l'accs
l'oeuvre. Ce qui importe, c'est plutt l'oeuvre en cours, en parcours, qui
ncessite des allers-retours dans les processus de ralisation ou de
fabrication afin de s'ajuster ses objectifs, savoir s'ancrer dans monde
(quartier, gens ou la socit en gnral etc...) ou dans les communauts
spcifiques dans lequel lĠart interagit (cole, prisons, hopitaux, comits
d'entreprise, etc...).
Il est donc question, pour agir sur des populations, de dvelopper
des dynamiques, crer des situations, des expriences, qui permettent de :
- r-animer des soifs de curiosit, de comprendre,
d'apprendre ;
- bousculer les ides reues, dcaler les contextes habituels,
pour recrer des dialogues et des changes, relancer des perspectives ;
- relier ce qui, dans le
quotidien du territoire, lui est spcifique, sa culture, ses habitudes de
comportement, de circulation, de contact avec les "autres"É ;
- redonner le sentiment quĠil est possible de changer son
quotidien ;
- rveiller des dsirs, donner de la confiance en soi, de la
force, de la beaut rveiller ce qu'il y a de plus humain en nous pour nous donner
envie et imagination.
a) Modalits et accents particuliers
Il nĠest pas question dĠimaginer un programme d'activits ou
d'actions mais de crer un dispositif qui permette d'couter et de rpondre aux
besoins d'laboration de cet art-l, savoir :
- ncessit de temps de recherche ;
- ncessit de confrontations, dĠchanges, de partage du
sens ;
- ncessit de lieux de travail personnels et partags ;
- possibilit de rptitions publiques un stade donn ;
- possibilit dĠateliers de pratiques ;
- recherche de liens avec d'autres artistes, avec des associations
de terrain ;
- recherche de liens avec des chercheurs qui donnent des
perspectives socitales ;
- accs des ressources diverses (sur d'autres recherches en
cours artistiques ou non, sur des outils techniques, des matriauxÉ) ;
- besoin de parler de son travail, avec des artistes, des
publics, des professionnels ;
- besoin de s'exposer, de se connecter du local d'autres
localits dans le monde
et... ncessit d'explorer tout ce que cela draine en
priphrie : urbanisation, architecture, ducation, expriences
"professionnalisantes", lien avec d'autres structuresÉ
Le rsultat, c'est autant tout ce qu'a drain l'acte en train de
se faire que le produit final, qui devient ainsi une Ïuvre
"complte", porteuse du symbole de tout ce processus de transformation,
et dans lequel chaque participant va, sa mesure, se retrouver.
NĠoublions pas que le champ dĠexprience, le champ dĠaction de ces
projets est d'abord la proximit.
Nous sortons donc d'une logique du rsultat qui serait rduite (ou dont l'intrt principal serait) une production en soi musale ou collectionner ou de spectacle vivant avec en face un nombre de visiteurs ou de spectateurs mesurer, pour une logique de rsultat qui serait d'agir pour crer du dialogue, des liens, des imaginaires, des actions pour "changer", pour apprendre.
Les Ç mots-rfrences È pourraient ici tre : le quotidien, le permanent, pourquoi pas l'vnement (ou le festival mais dans la
mesure o on peut l'utiliser pour changer le quotidien), la transmission, la transformation des attitudes, la recherche, le travail sur la dure, lĠchange (de pratiques et de savoir
faire), la mise en rseau, la mise en commun (de bonnes pratiques, de choses apprises)É
Cette
ralit contemporaine est l'exprience qui, pour lĠinstant et pour les annes
venir, va redonner une place importante l'art et la culture dans la socit. Pour rpondre cela, nous demandons la puissance
publique de changer de systme de mesure et de mthode qui ne soit pas la
conception d'un programme tout fait mais la capacit entendre et rpondre
ce qui n'est pas directement mis en place par elle mme, dans la mesure o ces
actions remplissent une mission publique souhaite par la puissance publique
b) Autres propositions pour l'intervention publique
Nous attendons du Ministre un soutien
financier la hauteur des enjeux et des missions que nous dfendons : soutien
la cration contemporaine, rsidences d'artistes, permanence artistique,
dveloppement culturel mieux rparti sur le territoireÉ
Cette politique nationale doit tre
affirme par une Directive Nationale d'Orientation afin que les prfets et les
DRAC apprhendent bien l'accompagnement de nos projets comme une priorit
gouvernementale en matire culturelle et que les moyens financiers dcids en
"centrale" ne se dissipent pas dans la globalisation des crdits des
DRAC.
De nouvelles mthodes d'valuation
doivent tre penses pour permettre l'apprciation des projets artistiques et
culturels. Une approche transversale et spcifique porte par les inspections
de la danse, du thtre, de la musique, des arts plastiques est ncessaire en
raison de la qualit interdisciplinaire des projets. De mme, les diffrents
conseillers en DRAC seront associs cette valuation, tout comme doivent
l'tre les services culturels des collectivits partenaires.
Mais
il ne saurait y avoir d'valuation sans une contractualisation pralable avec
une dfinition prcise de projets assortis d'objectifs, de cahiers des charges
et de moyens inscrits dans la dure. Cette contractualisation doit associer les
porteurs de projets, l'tat et les collectivits territoriales pour un
conventionnement pluriannuel garant de la prennit des projets.
Dans le cadre dĠune culture de partenariat entre les institutions, les porteurs de projet, les populations, culture qui reste construire et dvelopper, nous souhaitons voquer les projets tels quĠils sont, tant dans leurs contenus que dans leurs mode de fonctionnement. Il nous faut inventer avec nos interlocuteurs la forme qui pourra la fois concilier notre projet/nos projets tel quĠil est/tels quĠils sont et les besoins de lĠadministration. Cette forme issue du travail commun sera le rfrentiel partir duquel un systme dĠvaluation qualitative peut tre mis en place
Plus concrtement, ce rfrentiel commun pourrait prendre en
compte des lments indiqus par les porteurs de projet tels que : objectifs, descriptifs des actions, personnes
concernes, calendrier ou points de repres dans le
temps, indicateurs dĠvaluation, fonctionnement de lĠquipe, etc. Ce rfrentiel serait articuler avec
les politiques publiques de chacune des collectivits. Le Ministre de la
Culture et ses services dconcentrs, les DRAC, seraient les pionniers de ce mode de fonctionnement et nous
aideraient le transmettre dĠautres institutions.
[1] Sous ce terme, que nous rsumerons
parfois par Espace / projet, nous entendons les types de projets runissant les
membres de lĠassociation Autre(s)pARTs, et qui cherchent construire une nouvelle
relation entre lĠart, les territoires et les populations.